Lectures et critiques
14 Mai 2015
Marc Lavoine décrit une vie familiale dont le récit s’articule autour de Lulu, son père, qui travaille aux P.T.T. Lulu syndiqué, militant et actif, bon et joyeux camarade qui trompe sa femme sans vergogne, de façon plutôt bien organisée, sans rien cacher à ses enfants.
A la lecture du récit j’ai perçu de la part du narrateur un ressenti à plusieurs facettes :
- une facette qui révèle une enfance paisible et rassérénante lorsqu’il est entouré de ses grands-parents ; on réalise qu’ils avaient une grande importance pour le petit garçon qu’il était.
- une facette plaisante, l’été dans le Lot, en famille. Il semble insouciant, non affecté par ce qui se trame en fond de scène. On commence tout juste à percevoir chez l’auteur qui grandit une évolution du ressenti.
- l’autre facette, plus tourmentée, est décrite par le jeune homme qu’il est alors et qui voit les conséquences des agissements de Lulu sur Michou, sa mère : une souffrance tue ; une souffrance qui transpire, silencieusement, par les larmes et la dépression. Ne pas crier. Ne pas faire de bruit. Essayer de rester droite. La pudeur aussi face à des maux avec lesquels chacun s’arrange (l’alcoolisme, la tromperie).
Le narrateur ne se positionne pas en moralisateur ou en défenseur de l’un ou de l’autre et ravale ce qu’il constate de visu, sans bruit, soutenu, contenu par son frère. Les sorties entre copains, les bêtises, les blagues, restent de mise à cet âge-là et semblent une bouffée d’oxygène qui suspend ou supplante ce moment où la tristesse va poindre. L’affliction ressentie se manifeste sans aucune violence même si on l’imagine sourdre sous peu. Le narrateur a assez de clairvoyance pour manœuvrer sans blesser quiconque, sans se nuire à lui-même et trouve dans le théâtre une échappatoire salvatrice sous peine de suffoquer ou de dériver. Une sortie de scène familiale magistralement bien menée.
J’ai apprécié la lecture de ce récit, son rythme. J’ai souri à l’évocation des souvenirs des soirées entre adolescents, des premières mobylettes, des gentilles bêtises que l’on fait.
J’ai apprécié l’émotion liée aux souvenirs des aïeux.
J’ai beaucoup aimé ce récit qui tantôt bouleverse, tantôt fait sourire.
Ce récit m’a beaucoup émue. A la fin, j’ai pleuré.
« tu as dû t’en taper, des nuits blanches, noires et grises à force de te surveiller toi-même pour ne pas te faire prendre la main dans un panty. A en appeler une par le prénom d’une autre ».
« On était bien organisés et nos lampes torches éclairaient nos visages et ceux de nos leaders, sur lesquels nos pinceaux révolutionnaires s’agitaient consciencieusement. D’un coup de balai très précis au centre de l’affiche, nous collions et nous collions et nous collions sans faire de faux plis. On était bons, j’ai longtemps cru que ça marcherait, que la famille réussirait à se recoller elle aussi ».
A notre retour intra-muros, ils allèrent se murer pour se sécher dans leur chambre. J’ai préféré me mettre au lit, j’ai demandé à mon frère de me surveiller, comme il le faisait depuis toujours. Il s’allongea derrière moi, son bras me prit contre lui, il me dit : « détends-toi, je suis là, je te surveille »
Alors Marc Lavoine est mon chanteur préféré : j'ai encore chez mes parents les premiers 33 tours -ça ne nous rajeunit pas-. Si je suis fidèle spectatrice de ses spectacles et de certains de ses films, j'espère qu'il sévira de nouveau dans l'écriture et que je serai de nouveau sous le charme